Pour ce premier dimanche de Carême, je reprends un article paru il y a 1 ou 2 ans, très légèrement adapté, mais dont l’essentiel est dû au Père Jean Compazieu, prêtre en retraite et qui gère plusieurs sites sur internet.
Jean Bisson – 13 03 2011
Carême : histoire et symbolique (du 40)
Chaque année, l’Eglise nous propose de vivre un temps de préparation aux fêtes pascales. Cette tradition remonte aux origines. De fait, le mot « carême » nous vient de l’expression latine « quadragesima dies » : le quarantième jour, avant la Pâque, temps symbolique d’une grande richesse spirituelle.
Bref historique - Déjà dans les tout premiers siècles, on prenait un temps de jeûne pour se préparer à la seule fête importante pour les premiers chrétiens : la Pâque. C’est à partir du IV° siècle qu’on a introduit 40 jours de préparation dans le jeûne et la prière. Ce sont les conciles de Nicée en 325 et celui de Laodicée en 365 qui instituent les 40 jours de jeûne avant la Pâque dans les Eglises d’Orient ; Rome n’adoptera le carême que 3 siècles plus tard.
Symbolique – 40 est un nombre hautement symbolique. On sait l’importance du symbolisme des nombres dans les cultures antiques. La culture biblique se situe tout à fait dans cette tradition (avec la Cabbale).
Dans les cultures antiques - Le nombre 40 symbolise la période de transition, de retour sur soi qui précède tout changement profond. On sait qu’un pharaon n’était enterré que 40 jours après sa mort ; ce laps de temps était consacré à la préparation de son grand voyage. Les 40 jours qui suivent un décès sont considérés comme délai nécessaire à la séparation définitive des 3 composants de l’être : corps, âme et esprit. Les familles chrétiennes faisaient célébrer un « messe de quarantaine » qui clôturait la période de « grand deuil ».
Dans la Bible - La 4ème lettre de l’alphabet hébraïque « daleth » (dont la valeur numérique est 4) signifie « la porte » : le moment où l’on pose la main sur la clenche de la porte et l’on se retourne pour estimer le chemin accompli et à accomplir. On sait l’importance symbolique de la porte qui ouvre et ferme les espaces !
40 jours, c’est la durée du déluge : les eaux tombent durant 40 jours et 40 nuits, nous dit le texte de la Genèse. [01]
40 ans : c’est la durée du séjour du peuple hébreu dans le désert. Au désert les Israélites
construisent la tente de la Rencontre (avec Dieu !) : lieu où Moïse écoute Sa Parole.
Durant ces 40 ans Dieu entoure les Israélites de soins [03].
40 jours, c’est la durée du séjour de Moïse sur le mont Sinaï, là où Dieu lui fait le don de la loi [04]. Moïse intercède et fait pénitence 40 jours pour que le Seigneur épargne la vie au peuple juif [05]
40 ans, c’est la durée des royaumes de David et de Salomon [06].
40 jours, c’est encore la durée du voyage du prophète Elie, qui marche, après avoir été nourri miraculeusement, jusqu’au mont Carmel pour entendre la voix de Dieu dans une brise légère [07]
"Encore 40 jours, et Ninive sera détruite" prêchait Jonas pour inciter à la conversion. [08]
40 jours c’est encore la durée du séjour de Jésus au désert, au lendemain de son baptême. Pendant 40 jours, nous dit l’Evangile, Jésus a prié et jeûné au désert avant que le diable ne vienne le soumettre à la tentation [09]
Jésus, après sa Résurrection enseigne ses disciple pendant 40 jours jusqu’à son Ascension [10].
Conclusion : Que conclure de tout cela ? Dans la Bible, 40 c’est le symbole de l’épreuve qui nous prépare à rencontrer Dieu. Et c’est aussi le temps où Dieu prend soin de son peuple de ses enfants ; Il les nourrit et les instruit. Temps qui purifie le cœur, qui le prépare à vivre une étape importante : l’alliance entre Dieu et l’humanité scellée après le déluge, l’entrée dans la terre promise, le don de la loi, la rencontre avec Dieu, l’annonce de la Bonne Nouvelle pour Jésus.
40 jours, ce sera pour nous aussi un temps pour nous laisser conduire au désert, nous laisser instruire par le Seigneur dans l’épreuve comme dans l’expérience de l’amour paternel de Dieu. Laissons-nous guider par l’Esprit pour revenir et redevenir les enfants du Père et accompagner le Christ jusqu’au don total de lui-même, le temps d’une préparation à l’expérience fondamentale de la mort et de la résurrection que nous vivrons avec le Christ dans le mystère de Pâques.
Notes de l'article
[1] Gn 7,17 : Il y eut le déluge pendant 40 jours sur la terre ; les eaux grossirent et soulevèrent l’arche, qui fut élevée au-dessus de la terre.
[3] Ac 13,18 : Le Dieu de ce peuple, le Dieu d’Israël élut nos pères et fit grandir ce peuple durant son exil en terre d’Egypte. Puis, en déployant la force de son bras, il les en fit sortir 18 et, durant 40 ans environ, il les entoura de soins au désert.
[4] Ex 24,18 : 18 Moïse entra au milieu de la nuée, et il monta sur la montagne. Moïse demeura sur la montagne quarante jours et quarante nuits.
[5] (Dt 9,25) :25 Je me prosternai devant Yahvé, je me prosternai quarante jours et quarante nuits, parce que Yahvé avait dit qu’il voulait vous détruire.
[6] 1R 2,11 Le temps que David régna sur Israël fut de quarante ans ; 1R 11,42 42 Salomon régna quarante ans à Jérusalem sur tout Israël.
[7] 1R 19,8 :8 Il se leva, mangea et but ; et avec la force que lui donna cette nourriture, il marcha quarante jours et quarante nuits jusqu’à la montagne de Dieu, à Horeb.
[8] Jo 3,4 : 4 Jonas pénétra dans la ville ; il y fit une journée de marche. Il prêcha en ces termes : "Encore 40 jours, et Ninive sera détruite".
[9] Mc 1, 12-13 : 12 Aussitôt, l’Esprit poussa Jésus dans le désert, 13 où il passa quarante jours, tenté par Satan. Il était avec les bêtes sauvages, et les anges le servaient.
[10] Ac 1,3 : 3 Après qu’il eut souffert, il leur apparut vivant, et leur en donna plusieurs preuves, se montrant à eux pendant quarante jours, et parlant des choses qui concernent le royaume de Dieu.